La Maison du Tourisme : L’innovation au coeur du nouveau « Bureau d’Immersion Touristique » (BIT) d’Arras-Pays d’Artois.

S’imprégner pour comprendre. J’ai eu la chance de mener une étude pour comprendre en profondeur le rôle d’un Bureau d’Information Touristique (BIT) et la place de celui d’Arras, situé au pied du beffroi classé sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, qui accueille 215 000 touristes chaque année.

Comprendre pour définir. Cette imprégnation m’a permis de définir ce que pouvait être une innovation à l’échelle d’un BIT.

Un Bureau d’Information Touristique devient innovant quand il passe d’un service à une expérience positive. Le temps passé en son sein crée une expérience touristique qui devient un des éléments du voyage. Cette expérience touristique vise à ancrer un souvenir positif, influenceur de séjours à répétition, plus longs et étalés dans l’espace. Ce souvenir positif est facilité par l’émotion, elle-même facilitée par l’intégration d’une expérience immersive.

La réussite d’une expérience immersive dépend de la capacité à créer un univers en dehors des clichés, de la capacité à sortir du chaos-catastrophe / Chaos-germe de Cézannes pour atteindre le “fait immersif” : une création en dehors du cliché, une expérience innovante. Cette expérience n’a pas pour seul but d’être appréciée. Elle doit faciliter la compréhension et la mémorisation d’un territoire, et également influencer les touristes à se déplacer en son sein. Il s’agit donc d’une expérience immersive pédagogique.

Une expérience immersive pédagogique est réussie quand elle atteint le « conatus immersif« . Le conatus selon Spinoza désigne « l’impulsion qui fait passer du repos au mouvement« . L’expérience doit ainsi transporter les touristes dans un univers inspirant qui impulse un mouvement. Le mouvement est définie par l’action de mémorisation et/ou de déplacement du corps.

S’il veut être innovant, un Bureau d’Information Touristique doit donc intégrer en son sein une expérience immersive pédagogique pour transformer l’information en immersion et ainsi améliorer la mémorisation et impulser l’envie de découverte du territoire. Il devient un Bureau d’Immersion Touristique : une expérience touristique à part entière, point de départ des voyageurs dans la quête de découverte d’un territoire.

À la recherche d’une efficacité pédagogique :

• Sciences cognitives = en appréhendant les mécanismes cérébraux générant la mémorisation et influençant le comportement (à l’image des liens entre émotions et mémoire, de la loi de Miller amenant les principes de l’apprentissage progressif, de la psychologie positive ou de la règle de « peak-end » fixant les instants-clés de l’expérience) ;
• Art = en transposant ces mécanismes et règles sous une forme mémorable (ludique, poétique, etc.) pour fluidifier l’échange ;
• Technologie = en l’utilisant toujours avec discernement, dans une vision utilitaire et durable, au service de la vision artistique et du récit à transmettre.

Nous avons créé un parcours touristique immersif au sein même du BIT (expérience sonore, visuelle, tactile, olfactive, théâtre immersif, IA développée en France, jeux low-tech).

Dans 4 espaces sur une superficie de 160 m2, les 215 000 voyageurs annuels seront en déambulation libre dans l’univers onirique de la Maison du Tourisme d’Arras Pays d’Artois.

Chaque espace est un émerveillement qui utilise les émotions vers l’usage. Ressentir le territoire pour mieux le mémoriser et le visiter.

Chaque espace est également un point d’entrée vers un parcours de marketing omnicanal. On ne peut retenir que 5 à 9 informations dans notre mémoire temporaire, d’où l’importance de créer des ponts entre les canaux de communication pour que les touristes soient guidés tout au long de leurs séjours, du moment où ils passent la porte du BIT, jusqu’à leur fin de séjour, et même au-delà.

Inspirée par l’histoire du territoire, la scénographie harmonise l’artisanat ancestral (vitraux, sculpture, céramique, ébénisterie) avec des nouvelles technologies cachées.

Dans une démarche artistique et éco-responsable, j’ai affiné le concept sous forme de modello : une méthode de la Renaissance qui consiste à réaliser des dessins finaux avant l’exécution de l’œuvre. Une création à la main sur papier grands formats, en dessin et en aquarelle, à la lumière du jour.

Ils permettent de se projeter visuellement dans l’expérience, d’en dessiner les aspects techniques et de transmettre l’atmosphère et les émotions qui s’en dégagent.

Cette méthode m’a permis également de prendre le temps de déclencher des idées. Au-delà du dessin, c’est toute une réflexion qui s’affine, une création qui mûrit, car le principal n’est pas de sortir un rendu ultra-réaliste en 3D, mais de développer une idée réalisable. Cela permet d’être en capacité d’argumenter sur chaque détail, car chaque détail est un choix mûrement réfléchi, comme un puzzle recomposé.

L’Immersarium, un des 4 espaces, est notamment un défi technique.

Un mégalithe de 5000 ans, symbole du territoire, raconte l’histoire d’Arras Pays d’Artois à travers une scénographie immersive. Une immersion totale où l’espace et se temps se déforme pour donner vie au récit et emporter les touristes dans un univers onirique.

Cette expérience innovante nécessite une phase de POC (proof of concept) composée d’une étude technique et d’un prototype de l’espace final à échelle 1/3 pour valider la faisabilité et concevoir une solution technique robuste et efficiente. Cette phase réunit une équipe d’une dizaine de personnes. Une démonstration du prototype sous forme d’une exposition pédagogique a eu lieu le 25 mars 2025 dans le beffroi d’Arras en présence des élus, de la région Hauts-de-France et des parties prenantes.

La Maison du Tourisme s’articule nativement avec une méthode d’éco-conception définie pour le projet.

Cette méthode intègre une philosophie pratique : mettre au centre du cercle décisionnel l’homme et l’environnement pour garantir un impact humain fort et une empreinte environnementale faible.

Pour guider cette démarche :

• un modèle d’éco-conception inspiré de la méthode ACV (Analyse de Cycle de Vie), de la roue de brezet et d’une approche monocritère : Changement climatique (kg CO2 eq) a été conçu et appliqué.
• un modèle d’achats a été mis en place dans une recherche d’efficience environnementale et économique.
• une étude technique comparative a guidé nos choix technologiques.
• un Bilan Carbone® comparatif a été réalisé pour tracker l’efficacité de l’éco-conception.

Cette méthode nous a permis d’observer un lien intrinsèque entre impact environnemental, processus de création artistique, tissu économique local et efficience financière.

Ce processus d’éco-conception a vocation à être partagé dans une démarche désintéressée.